vendredi 19 octobre 2007

Tires la plogue

- Gino, t’es mon frère.
- Oui, mais je suis aussi son ami.
- Tu ne penses pas que les liens de sang sont plus forts.
- Là n’est pas la question. Tu t’es mis toi-même dans ce pétrin là.
- Il m’a pompé! Avec ses histoires de jeune guatémaltèque.
- Jehanne, tu lui as lancé ta caméra par la tête. T’as fourgué le système de son, la télé et la vidéo par la fenêtre. T’as eu le culot d’appeler la police et de lui mettre ça sur le dos.
- J’étais folle de rage.
- Ça ne se fait pas des affaires comme ça.
- …. (sniff)
- Jehanne. Viens ici. Poses ta tête. Pleures un bon coup.

Jehanne pleura sans retenue. Elle comprenait bien que la solution n’était pas de ramener Tancrède à Montréal. Comme Gino lui avait expliqué, Tancrède s’était montré bon joueur et n’avait rien dit aux policiers. Il avait joué le jeu, son jeu à elle, un jeu ridicule et dangereux. Il l’avait fait pour tout l’amour qui lui restait. Maintenant, il était parti, il avait laissé tout son amour pour elle derrière lui en échange de sa liberté. Il voyageait maintenant.

- Aides-moi.
- Je ne veux pas mêler Tancrède là-dedans.
- Je comprends, on ne mêlera plus Tancrède à mes problèmes. Mais aide-moi à m’en sortir.
- À mes conditions, sans me questionner?
- Oui.
- La première chose que je veux que tu fasses, c’est que tu tires la plogue.

lundi 15 octobre 2007

La camera

- Yves Jacques androgine, vous ne trouvez pas que ça fait type-cast?
- Pas vraiment. Ça donne un côté actuel au projet. Eve a été faite avec une côte d’Adam? Donc, il se peut très bien qu’Eve ait ressemblée à Adam.
- N’avez-vous pas peur d’être comparé à la « Petite vie » ou une extension des « Invasions Barbares » ?
- Non. Le personnage de Rémi meurt à la fin. Overdose d’héroïne. Marie-Josée Croze a obtenu un Lion d’Or pour lui avoir injecté la drogue. Yves Jacques aurait à travailler un personnage nouveau. Quelque chose de plus féminin-féminin que masculin-qui-se-veut-féminin. Croyez-vous que Johanne-Marie Tremblay dans le rôle de Sœur Constance Lazure était délibéré de Arcand pour faire un parallèle avec « Jésus de Montréal »?
- Je ne comprends pas.
- Oui, même nom de personnage. Elle aurait rejoins le curé qui voulait pas défroquer.
- Peut-être bien… Et Rémi Girard, ça va être une extension « Cro-Magnon » du père Bougon?
- Madame, si je prends Rémi Girard, c’est pour avoir du financement.

Bzzz….bzzz…

- Mademoiselle Rodrigue, votre portable sonne. (Impatient) Aller, répondez.
- Allo…. Oui, c’est moi….. Oui… Vous dites…. QUOI? (Jehanne écouta un long moment puis ferma son portable).
- Mademoiselle, vous êtes toute blanche. Assoyez-vous. Vous voulez de l’eau?
- Taba..
- Pardon?
- Ma camera.
- Oui, votre camera.
- Mes… l’assurance.
- Oui, votre assureur.
- Il ne remboursera pas.
- Il ne rembourse pas quoi?
- Ma caméra.

Adam et Yves

- Rémy Girard ? Ouain pourquoi pas. Il aime bien donner un coup de main aux étudiants. Mais il est très sollicité. Quel serait ton propos ?

- Les ruptures datent de l'âge de pierre, si je peux dire. Que sait-on de la vie de couple d'Adam et Ève ? Bien peu de choses !

- C'est un peu entendu. On a déjà vu Un gars une fille... Pourquoi pas tourner un jeune blogueur de son temps entertainer de jeunes incultes tant qu'on y est ?

- Vous ne m'aurez pas ! Vous savez que je suis le plus grand fan de Patrick Lagacé! Je ne rirai pas de cet apôtre du je-me-moi.

- Bon d'accord. Je donnerai cette idée de scénario au boutonneux qui attend son tour à l'extérieur de mon bureau. Pour faire Adam et Ève, il faut Ève. Qui choisiriez-vous?

- Yves Jacques.

La panne

- Bon, c'est quoi ton histoire, qu'est-ce qui marche pas?

- Pourquoi tu dis ça? Attends deux secondes, je mets mon status Facebook à jour....

- ...

- Ok. Donc?

- Tu fais la gueule là, chose, c'est quoi, ça marche pas votre histoire?

- Meuh oui, j'aime bien ça la prémisse et tout, c'est juste que les gens ont pas l'air très dedans. C'est plus terre-à-terre que l'autre. On dirait qu'on est moins flexibles ici, c'est plus structuré et tout. Difficile de faire du n'importe quoi, genre faire apparaître un monstre centipède qui arrache la tête du héros et se transforme en chèvre qui chie de l'or.

- Tu voudrais chier de l'or, toi?

- Bin... ça payerait mes contraventions.

- Épais.

____

C'est à ce moment que Jehanne Rodrigue, devant la fausse Denyse Robert, ci-devant instruite de lui apprendre le b-a-ba de la scénarisation, proposa une tournure intéressante à sa prémisse ennivrante mais empoulée.

- Et si on repartait tout au temps d'Adam et Ève, à la plénitude du Paradis terrestre?

- Ouf. ouan ok, et qui va jouer le rôle d'Adam?

- Rémy Girard.

jeudi 11 octobre 2007

From scratch

-- Vous ne trouvez pas que vous voyez trop gros?

-- (...)

-- Comment allez-vous tourner vos scènes à Nice?


-- (...)

-- Je suis désolé, mais votre scénario doit être réalisable dans les limites de nos institutions. Vous n'êtes pas Denys Arcand, Jehanne Rodrigue, et heureusement, je ne suis pas Denise Robert!

-- C'est mon projet. Je le mène comme je le veux!

-- Vous étiez bien partie avec cette histoire de rupture pourtant! Un peu mainstream peut-être, mais prometteur... Et en tant que productrice, je me dois de vous rappeler à l'ordre.

-- Productrice! Le terme est fort, madame Chabal. Vous êtes mon prof. That's it! Un jour je ferai un hit avec ce scénario. Quant à l'ordre... merci, j'ai déjà donné!

-- Peut-être... peut-être... En attendant, je suis ici pour vous apprendre la base, all right?

mercredi 10 octobre 2007

Le mail

Alors, je continue ce que je disais :

Après une marche sur la Promenade des Anglais, je suis allé manger un travers de porc à la canadienne au restaurant Le Québec, non loin de mon hôtel. Et c’est là, à l’entrée de ma chambre, que je la vis enfin, ma valise.

Elle avait été perdue à l’aéroport. Nul besoin de spécifier, mais je le fais tout de même, que j’avais très hâte de retrouver mes vêtements. Six jours dans les mêmes caleçons, ça vient que ça chauffe, comme qu’on dit.

La nuit de sommeil suivante ne me porta encore aucun conseil. Au matin, je pris une autre marche, cette fois jusqu’au Quai des États-Unis (vivons dangereusement), j’allai manger des moules, Place Pierre-Gautier, quand Rita m’accosta.

-Bonjour monsieur, vous êtes seul?

Me dit-elle.

-Oui.

Que je lui répondis.

-Suivez-moi, je vous prie.

Qu’elle a poursuivi.

-…

Que j’ai rien dit.

-Voilà, cette place vous plaît-elle?

Qu’elle me demanda.

-Oui.

Que je lui répondis encore.

-Installez-vous, je reviens.

Qu’elle m’a juré.

(J’espère que tu me suis bien dans mon dialogue, c’est parce que je ne suis pas aussi bon auteur comme toi, moi.)

Et pis c’est là, j’ai commandé ces moules que j’ai tant vomies.

Voilà ce que je n’avais pas fini de te raconter. Sur ce, je te laisse, mon temps d’Internet achève et j’ai rendez-vous au Musée Matisse avec Rita.

Ciao!


Une engueulade de plus

J’en parlais à Gino au cours du déjeuner. À nouveau, il pris une grande respiration et me dévisagea.

- C’est ou que tu vas chercher ces idées là? Non mais, penses-y un peu. Tu es un veuf de 37, avec un enfant de 19 ans. Tu es un des meilleurs traducteurs de l’Ile de Montréal lorsqu’il s’agit des textes en anglais, italien ou français. T’es encore assez beau bonhomme, tu n’a pas de dette, pas de char et plus d’appartement à t’occuper. Ton fils, Gabriel, est premier de classe en technique policière, il a déjà été accepté à Nicolet. Il est économe comme pas possible, travaille comme portier les vendredis et samedis et a mis de côté durant neuf ans la rente d’orphelin qu’il a reçu…. Penses-y,… tu as des réactions de femmes névrosées qui se trouvent trop grosses et pas belles. Rentrer chez les Carmes Déchaux. Quant à y être, pourquoi pas rejoindre les Filles d’Isabelle?
- C’était juste une idée… Comme çà.
- Je pense que t’a encore ma sœur dans le corps. T’as besoin de prendre de la distance. Va-t’en. Prend un break. Oublis ma sœur, oublis Line… Et Line, une autre idée niaiseuse. Elle est lesbienne! Jamais tu pourras la sauter.
S’en suivit des pleures, une réconciliation, une engueulade de plus. Finalement, Gino avait raison. J’avais besoin de changer d’air. Je pris donc le premier vol pour Nice, mon ordinateur portable et une première édition d’un roman de John Irving : « Liberté pour les ours».