samedi 6 octobre 2007

La Game

Je sortis prestement chercher la télé qui heureusement, traînait encore sur le trottoir. Je me dépêchai de la rebrancher, il y avait un match de rugby que je ne voulais pas manquer (le quart de finale XV de France contre les All-Blacks), qui, si mes calculs étaient exacts, devait commencer d'ici deux minutes.
Je manipulai nerveusement la télécommande afin de trouver lequel des 78 canaux rediffusait le match.
- Non mais tu m'écoutes? c'est toujours comme ça, quand c'est pas le rugby, c'est le cricket, quand c'est pas le cricket c'est le boulin-fucking-grin ou les compétitions de saut à l'échalote! Tu peux pas écouter le hockey comme tout le monde?
Jehane (ou Line, voire Nathalie, anyway c'est pareil) poursuivait ses récriminations tandis que je cherchais toujours le poste. Dérangé par le bruit, je sortis distraitement mon Colt Magnum John Wayne Gacy Special Edition de mon jean, et, toujours concentré sur les pitons de la télécommande, je lui explosai sa tronche de merde.
Le bruit de la détonation fit apparaître l'autre Line/Jehane/Nathalie dans l'embrasure de la porte, un minou dans les bras, qui hurla en voyant le cadavre de notre ex. Ne pouvant plus supporter ses cris, je dégainai mon flingue et lui explosai sa tronche de merde. J'en profitai également (il me restait une balle) pour me débarraser de Tatie le chat, qui constituait un témoin gênant.
Je ferai le ménage après la game.

vendredi 5 octobre 2007

Ascendant scorpion

- Écoute, c’est moi qui vais parler. Après ton départ, j’ai appelé la police.
- Quoi?
- T’as bien compris. J’ai aussi envoyé la chaîne stéréo, la télé pis la vidéo par la fenêtre. Je leur ai dit que c’était toi. Que tu étais fâché, mais que tu ne m’as pas touché.
- QUOI?
- Je ne vais pas porter plainte, mais au moins, je vais pouvoir me faire rembourser la caméra par les assurances.
- HEIN?
- Responsabilité civile 1 000 000$ mon coco, ça ne te coutera rien… Mais tes assurances vont en prendre un coup.
- Ouais mais Line…
- Mêles moi pas là dedans. Jehanne c’est ma chum pis je vais la supporter. De la façon que t’es entré icitte, moi aussi je peux appeler la police.
- …
- Dis quelque chose mon coco.
- …!
- Pis tes jumelles sont dans le tiroir de la cuisine. En fait, on ne dit pas des jumelles, mais une jumelle.
- (Line feuilletant le dictionnaire) Nom féminin. Instrument d’optique composé de deux lunettes.
- (Relevant son nez du dictionnaire) Voilà d’où vient l’erreur. « Deux lunettes »
- Je fais quoi maintenant?
- « Voyons coco, va chez Gino. C’est là que j’ai envoyé la police. » dit Jehanne avec sarcasme.
- Je leur dit quoi?
- On s’est chicané. Frustré, tu as lancé ma caméra par la fenêtre. Comme le premier épisode jouait sur la télé, t’as aussi envoyé la vidéo et la télé.

Les négos

Line habitait à deux pas du pub où j’allais toujours noyer mon ennui, muni d’une stout tablette. Je fis un tour sur moi puis dans ce pub avant le lit de Line, qui m’en sortit à coup de pied au cul. Faut dire qu’elle avait de la compagnie, Jehanne était en rage dans un coin et Tatie la chatte dans ses bras.

-Line, la violence est une option bien négative pour m’informer de ton aversion à ma présence en ta demeure.

-Désolée Tancrède chéri, c’est pas moi c’est Tatie. Après l’amour, elle a de ses réflexes…

Sur ce, Jehanne se leva et me gifla.

-Désolée Tancrède chéri, c’est pas moi c’est ma colère.

-Jehanne, la violence est une option bien néga…

-Ta gueule !

-Qu’est-ce tu me veux, merde !

-T’as pas l’droit de sacrer ton camp de même, je te rappelle que t’as un chat, deux perruches et un fils chez moi!

-Écoute, je suis dans ma crise de quarantaine, ce qui me donne droit à l’immunité.

-L’immunité mon cul, t’as juste 37 ans mon Hostie.

-T’as juste à mettre Luk à la porte, il est majeur après tout.

-Là n’est pas la question.

-Bon, si tu veux bien sortir maintenant, je dois parler à Line à propos de nos jumelles.

Hors de Plantaville, point de salut

Cette visite à Plantaville marqua au fer rouge la fin de notre union.

Je l'ai su tout de suite. Hormis l'excellent rapport qualité-prix, je sus que Jehanne avait trouvé chaussure à son pied sous la forme d'un jeune apiculteur prénommé Gaël, dont l'étymologie nous ramène, par quelques coins rondement tournés, à «chien sale».

L'animal en question faisait saliver Jehanne-Nathalie à un point tel que les jeunes pousses de rutabaga qui trônaient à nos pieds n'auront nullement besoin de la pluie et du bon temps pour les mois à venir.

Qu'avait-il de plus que moi, ce jeune guatémaltèque? Enlevez lui son corps sculpté dans l'acier, ce regard intense et frondeur, ce sourcil parfaitement ciselé, cette assurance dont Denise Bombardier aurait été jalouse, et que lui reste-t-il?

On est venu déterrer des poiriers, on y a enterré en lieu et place la mère des enfants que je n'aurai pas.

C'est sur cette pensée que je me déterrai des seins de Jehanne.

- L'air est vicié icitte, moi je décampe. Oublie pas d'arroser les poiriers.

- Tancrède, calvaire. T'es obligé de dire des niaiseries au lieu de dire ce que tu penses vraiment?

- C'est que j'ai plus d'estime pour eux que pour toi, chérie. Je retourne chez Line. Si tu veux me parler, t'auras juste à téléphoner chez elle. Tu connais le numéro de ton ex-blonde anyway. Ciao.

J'avoue que j'ai été assez surpris, en sortant de notre... son appartement, de voir la caméra traverser la fenêtre à vitesse grand V, pour aboutir devant moi, vomissant une cassette maintenant désuète. Dommage. Ça aurait fait un bon show.

jeudi 4 octobre 2007

Prise cinq, 3ieme épisode

Tancrède revint que plus tard dans la soirée. Lentement, il ouvrit la porte, laissa son veston sur le divan et alla dans la chambre à coucher.

- « Je suis ici » dit Jehanne de la cuisine.
- Ça va?
- Oui. Tétais où?
- J’étais chez Gino. Il va me prendre pour quelque temps.
- ….
- (Impatient) Dis-moi quelque chose!
- C’est quoi que t’aime pas du premier épisode?
- Rien.
- Rien?
- Je ne l’ai même pas écouté. Je ne veux juste pas que tu filmes notre vie quotidienne. C’est tout! Que ça te fasse entrer ou non à l’I.N.I.S.
- T’avais dit oui.
- J’avais dit « peut être ».
- …
- Peux importe ce que j’ai dit, je ne veux plus. (regardant derrière lui, la camera active) Tu nous filmes encore?
- Hostie. Tu n’es pas sensé parler de la camera quand tu la voies.
- Jehanne…
- « Nathalie » épais. Quand je tourne, appelle-moi Nathalie.
- Oui pis moi?..
- Toi, t’a pas été assez brillant pour te trouver un pseudonyme, endure!
- Enlèves ça de là. Arrêtes ça. Je ne veux pas. Je ne veux juste pas…. (Tancrède s’assit sur une chaise et porta ses paumes à ses yeux pour cacher ses larmes)

Lentement, Jehanne alla vers la caméra. Pressa le bouton « arrêt ». Elle se retourna, alla vers Tancrède, lui pris le visage et l’enfoui dans ses seins.

Ne pleures pas gros niaiseux. Hey que t’es moumoune.

Poire de discorde

Les pépinières, c'est bien connu, regorgent de tueurs en séries, de meurtriers machiavéliques, de ravisseurs d'enfants, bref : de pervers en tous genres.
Heureusement, ce n'est pas le cas chez Plantaville, où l'on vous offre toute l'année un service personnalisé incomparable, le meilleur rapport-qualité prix, et des arbres habillant toutes les tailles. De plus, mentionnez le mot de passe diffusé chaque jour entre 18h30 et 19h au bulletin télévisé diffusé entre 18h30 et 19h à la télévision, et obtenez un rabais de 15% sur tous nos poiriers.

— Un rabais de 15% sur les poiriers. T'as entendu ça, Jehanne ? Déjà que deux poiriers à 49$ chacun, c'était une aubaine !

— Ben oui, pis c'est quoi le mot de passe ?

— Euh... aucune idée.

— Exactement !, s'écria l'employée. « Aucune idée » était bien notre mot de passe au bulletin télévisé d'hier soir. Les deux poiriers, c'est pour faire livrer ou pour manger ici ?

— Pour livrer, soupira Jehanne.

Ma compagne rendit les armes telle Vercingétorix au mont des Oliviers, ou quelque chose comme ça. Nous roulâmes à 160 km/h pour arriver à la maison avant le livreur du Plantaville. Durant le trajet, nous ne dîmes rien. Nous nous tûmes. Les oiseaux croassèrent dans le lointain, mais comme les fenêtres de la voiture étaient fermées hermétiquement, nous ne les entendîmes pas.

Le lendemain, dès que j’aperçus les deux poiriers dans notre cour, je sus que les fruits juteux promis par ces arbres auraient surtout le goût amer du ressentiment.

mardi 2 octobre 2007

J'haïs les prunes

- … pour avoir des fruits, il faut acheter deux arbres. Ils ne sont pas obligés d'être de la même variété. En autant que ce soit un poirier.

La fille du Plantaville nous laissa à nos délibérations pour s'occuper d'un couple de personnes âgées qui voulaient savoir si un rhododendron avait besoin de beaucoup de lumière.

- Qu'est-ce que t'en penses, chérie. Moi je pense que j'en prendrais deux.

-Je ne sais pas. Je ne suis pas certaine qu'on a besoin de deux arbres. Et c'est quand même cher, tu ne trouves pas ?

- Pour des arbres, voyons, penses-y, deux beaux poiriers à 49 $ chacun. Dans dix ans ça va nous faire une forêt pour moins de cent piastres ! Et la fille a dit qu'on va avoir des belles poires l'été prochain.

Elle ne m'écoutait plus.

- J'aimerais mieux prendre un prunier. On était venu pour un prunier.

Elle le fait exprès. Elle sait que j'haïs les prunes.

- Mais non, cocotte, c'est mieux les poires, les prunes, c'est pour le couple là-bas avec leur rhododendron, c'est pour les vieux. C'est pour faire caca. Ils mangent ça pis des All-Brands.

- Non. Moi j'aime ça les prunes. Ça se conserve plus longtemps que les poires…

- Ciboire, Nathalie, depuis quand t'aimes les prunes ? Les prunes, c'est un fruit niaiseux…

- C'est toi qui es niaiseux, ciboire.

Action

Elle pleurait de nouveau lorsque l'image s'arrêta et que la cassette se rembobina par automatisme.

Un cliquetis dans la serrure et la porte s'ouvrit. Les mêmes gestes qu'elle avait vus dix, cent, mille fois se répétèrent sous ses yeux.

Il entra. Tancrède entra dans l'appartement. Il portait un sac de lin avec un litre de lait et un pain frais dans le sac. Il déposa le sac sur la table du salon.

- J'ai toujours été nul dans les départs. J'aurais dû t'apporter des fleurs. Je t'ai apporté des bonbons. Tu pourras en donner à ta nouvelle flamme.

Il les lança à côté d'elle sur le divan. Tant la hargne que la résignation irradiaient son visage.

- Mon Dieu Tancrède! Il n'y a pas d'autres. C'est juste que...

Et les larmes revinrent.

Tancrède alla pisser. Il sortit de la salle de bain sans rebaisser le siège et sans actionner la chasse d'eau.

- Tu es pathétique, dit-il avant de quitter les lieux.

Ils en étaient venus là à cause de deux poiriers.

Eject

L'épisode commençait avec un petit plan séquence, on suivant de dos un individu sortant de la salle de bain, et qui venait probablement de se réveiller vu sa tenue et démarche légèrement chancelante. On le suivait jusque dans la cuisine, où il s'assit, les épaules tombantes, devant un bol de café. Au moment où l'on se demandait qui pouvait bien lui avoir préparé, une jeune fille, pas spécialement jolie mais plutôt sexy dans son long t-shirt, entrait dans le cadre et s'asseyait devant lui. Elle ne souriait pas, ce qui était dommage car son sourire était magnifique.
- Salut.
- Mh.
Deux minutes passèrent ainsi dans le silence, elle, attendant qu'il lève les yeux, lui, fixant avec obstination le café qu'il ne buvait pas. Elle finit par s'impatienter.
- Tancrède?
Il leva la tête, mais s'arrêta à la hauteur de ses seins; elle était un peu complexée par leur taille, et ça la gênait qu'il les observe ainsi; il le savait mais n'avait pas le courage de croiser son regard.
- Tancrède, je pense que je ne t'aime plus. Je voudrais que tu partes.
- Je me disais bien...
Maintenant c'est elle qui fixait la table. La sentant mal-à-l'aise, il osait maintenant lever les yeux, et se permettait même une petite expression de hargne dégoûtée.
- C'est quelqu'un d'autre?
- Je voudrais que tu partes. Genre, là.
Il était parti, le temps de se rhabiller. Elle pleurait.

lundi 1 octobre 2007

Rewind Play

J'en ai décidemment assez de Tancrède et de ses éternels changements d'humeur. Maintenant le café est trop froid et il a décidé de partir en claquant la porte. Dieu merci, celle-ci est constituée de confettis tenus de peine et de misère sur quelques longs fils laqués. Le claquement ne dérangea donc personne.

- Je vais revenir plus tard, je vais aller marcher pour me changer les idées.

- Ramène du pain et du lait.

- Crisse toi le dans le cul, ton pain et ton l...

La porte d'entrée, une vraie celle-là, rota fortement la sortie de Tancrède, coupant net son envolée oratoire. J'espère qu'il va ramener le pain et le lait.

Bon je suis calmée maintenant. Allez hop, un tour au salon, je rembobine la cassette et on va voir c'est quoi qui cloche dans ce fameux premier épisode.

Le début de la fin

-Je te vois encore, assis devant moi, les yeux dans ton bol de café, les épaules tombantes. Si au moins tu me l’avais dit plus tôt, j’aurais peut-être pu faire quelque chose.

-Non, tu ne pouvais rien faire, c’est pour ça que je t’ai épargné cet épisode.

-Mais tu parles d’un épisode, le premier, c’est pas rien quand même, admets-le!

-Oui, je l’admets. Et qu’est-ce que tu en feras maintenant?

-Je ne sais pas, je dois y penser.

-…

-Tu fais chier à la fin!

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En d’autres termes, c’est un début.